Pour survivre, ce village de montagne a misé... sur les demandeurs d'asile - Divers 1

Pour survivre, ce village de montagne a misé… sur les demandeurs d’asile – Divers


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Vue de Chambon-le-Château

Vue de Chambon-le-Château

Vue de Chambon-le-Château (©Bastien.Pierre – Wikipédia)

Le village de Chambon-le-Château est menacé par l’exode rural. Le maire a donc décidé d’en faire un lieu d’accueil pour de nouveaux arrivants.

(BFM Immo) – Menacé par l’exode rural, un village de montagne, Chambon-le-Château, a fait le choix peu commun d’accueillir des familles de demandeurs d’asile qui font revivre ce petit bout du monde au prix d’un isolement dur à supporter. Au coeur des monts de Lozère, département le moins peuplé de France, Chambon-le-Château compte 300 habitants dont près de 20% de demandeurs d’asile.

Dans la brume dorée du matin, entre les maisons de pierre séculaires, un cortège de parents syriens, soudanais ou ivoiriens, des mères drapées dans de chatoyants tissus africains, convergent à pied vers l’école en tenant leurs enfants par la main. Les villageois français, eux, déposent le plus souvent leur progéniture en voiture. Les deux groupes d’adultes se saluent à peine. Mais dès la grille du préau franchie, les petits Français, Africains, Moyen-orientaux ou Asiatiques se précipitent les uns vers les autres pour jouer dans un joyeux brouhaha.

En Lozère, comme dans beaucoup de zones de montagnes en France, nombre de classes ont fermé en raison du départ des populations vers les villes. Mais l’école de Chambon-le-Château dispose de quatre classes, dont une spécialisée pour les élèves qui ne parlent pas français – 16 sur un total de 46. “Pour mon fils de huit ans, c’est vraiment une ouverture de rencontrer des enfants de pays différents”, s’enthousiasme Valérie, une habitante de ce village qui préfère ne pas donner son nom de famille. “Les enfants se mélangent bien”, relève une enseignante, Marie-Amélie Papon, qui compte dans sa classe de maternelle 11 élèves venus de Côte d’Ivoire, de Guinée, du Soudan ou de Syrie. L’organisation des cours est parfois “lourde” pour jongler entre les élèves francophones et non francophones mais l’expérience est “stimulante”, juge-t-elle.

Un choix rare

L’idée d’accueillir des familles en quête de protection est née il y a 16 ans à Chambon-le-Château. “Le centre d’accueil géré par (l’ONG) France Terre d’Asile est arrivé alors que la commune était sinistrée économiquement après la fermeture d’une laiterie et d’un établissement de formation professionnelle qui accueillait 80 jeunes en rupture avec la société”, explique le maire Michel Nouvel, 62 ans. “On avait un savoir-faire au niveau de l’accueil des personnes en difficulté, on a voulu continuer.”

Un choix pas forcément évident dans un pays où, par endroits, des riverains et mairies se sont opposés à l’implantation de telles structures. En France, un des deux pays recevant le plus de demandes d’asile dans l’Union européenne avec l’Allemagne -110.500 primo-demandes en 2018 selon Eurostat -, les places d’hébergement sont très insuffisantes. Face à la pénurie, des “campements” de tentes et cabanons ont surgi, en particulier en région parisienne.

Mais à Chambon-le-Château, “grâce à la présence du centre d’accueil, l’école a survécu, le bureau de poste a été pérennisé, nous avons gardé des emplois, une pharmacie, un médecin”, met en exergue le maire alors que nombre de communes françaises isolées sont privées peu à peu de services. Les demandeurs d’asile rapportent environ 20.000 euros par an à la commune et un revenu régulier à des particuliers. Car France Terre d’Asile les loge en louant des maisons et appartements appartenant à la municipalité et à des propriétaires privés, poursuit-il.

“Dur à vivre”

Sous un soleil d’hiver, une poignée d’Africains et de Syriens sont assis dans la journée sur les bancs de la place centrale, devant la mairie, pour profiter du Wifi gratuit et communiquer avec leurs proches par delà les frontières. Dans ce petit village classique de la moyenne montagne française, avec son château fort du XIVe siècle, son église paroissiale, sa fontaine, à 30 km de la première ville, il n’y a pas grand chose à faire. Beaucoup passent la journée entre la place peu animée et leur domicile. Le temps file lentement.

“C’est le bout du monde ici, c’est dur à vivre”, explique à l’AFP Junior, un Guinéen âgé d’une trentaine d’années. Autour de lui, une vingtaine d’autres demandeurs d’asile acquiescent. Leurs prénoms ont été modifiés pour des raisons de sécurité. Leur “oisiveté” fait parfois jaser la poignée de “réfractaires” du village, reconnaît le maire. Mais leur rappelle-t-il, ces hommes et ces femmes ne sont pas autorisés à travailler durant l’examen de leur demande d’asile. “Le village est beau, les habitants sont gentils, nous sommes enfin en sécurité mais il est très difficile pour nous de vivre dans un endroit si isolé, sans pouvoir travailler, sans transports publics, sans supermarché, sans autonomie, avec très peu de cours de français et pas de possibilité de suivi psychologique”, résume Nadim, un père de famille syrien trentenaire arrivé il y a sept mois après avoir fui la guerre ravageant son pays.

La problématique de la mobilité

“La mobilité, c’est une grosse problématique: on est vraiment isolé”, reconnaît la directrice du centre d’accueil Mylène Moreau. L’absence de transports publics dans cette France rurale frappe plus durement les exilés que les habitants, qui ont souvent des voitures. Côté commerce, le village ne compte qu’une pharmacie, un bar, une boucherie et une minuscule boulangerie-épicerie pratiquant des prix élevés pour la modeste allocation alimentaire des demandeurs d’asile -17 euros par jour pour un couple avec deux enfants.

Aller au supermarché ou chez un médecin spécialiste est toute une affaire. Pour se déplacer vers la première ville de Langogne ou vers Mende ou le Puy-en-Velay, à une heure de route, ils dépendent des transports organisés par le centre d’accueil. Pour ces hommes et femmes qui ont affronté guerres, persécutions et une périlleuse route de l’exil, ce quotidien austère et assez solitaire peut s’éclairer lors des quelques occasions de rencontres ou d’activités. Awa, une Ivoirienne, aide bénévolement à l’école et à la cantine. “J’en avais assez de rester enfermée dans mon logement”, dit-elle.

“Etre utile à la France”

Shamim, venu du Bangladesh, a demandé une guitare à la dernière fête de la musique pour chanter en public. Il attend l’été pour reprendre les parties de foot, un des rares moments d’interaction avec des villageois lozériens. Ce trentenaire est surtout “impatient” d’avoir le droit de travailler. “Pour moi”, dit-il “mais aussi pour être utile à la France”.

Depuis 2003, principalement en raison de l’isolement, seule une famille d’origine malgache est restée dans le village après avoir obtenu le statut de réfugié. Nombre de parents et d’enfants sont partis après le rejet de leur demande d’asile. En 2018, à Chambon-le-Château, seuls 24% des requérants ont reçu une réponse positive. A l’école, chaque départ est un déchirement. “Emotionnellement parlant c’est très dur”, témoigne Roxane Grousset, une enseignante “Le jour où nos élèves partent, on est dévasté.”

Avec AFP




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